Pays avec le plus grand nombre de locataires : le classement international

Le taux de locataires dépasse les 60 % dans certaines régions d’Europe, alors qu’il reste en dessous de 20 % ailleurs. Entre politiques publiques, prix de l’immobilier et traditions nationales, les écarts affichés par les statistiques surprennent par leur ampleur.

En 2023, l’Allemagne, la Suisse et l’Autriche figurent en tête du classement des pays européens comptant le plus de locataires. À l’inverse, plusieurs pays d’Europe de l’Est et du Sud maintiennent un attachement marqué à la propriété. Les chiffres soulignent des contrastes durables, révélant des dynamiques propres à chaque territoire.

Pourquoi le taux de propriétaires varie-t-il autant en Europe ?

Regardez la carte de la propriété immobilière en Europe : c’est un patchwork bigarré. Les statistiques d’Eurostat, reprises par SeLoger, posent le décor sans ambiguïté. D’un côté, la Roumanie atteint un sommet vertigineux avec 95,8 % de ménages propriétaires ; de l’autre, la Suisse reste en bas de l’échelle avec 41,6 %. La France s’installe pile au centre, ses 65,1 % de propriétaires reflétant un compromis typiquement hexagonal.

Difficile de comprendre ces écarts sans remonter le fil du temps et examiner les ressorts politiques et économiques qui façonnent chaque pays. Voici, concrètement, ce qui se joue dans les différentes régions européennes :

  • En Europe de l’Est, l’explosion du nombre de propriétaires découle des privatisations massives après la chute du bloc soviétique. Les logements d’État ont été transférés à leurs occupants, bouleversant durablement la donne. Aujourd’hui encore, la propriété y règne en maître.
  • Dans l’Europe du Sud, la propriété est une affaire de famille et de fierté. En Espagne ou en Italie, posséder son toit fait figure de rite de passage, indissociable de la valorisation sociale et du sentiment de sécurité.
  • À l’opposé, l’Allemagne ou la Suisse cultivent un tout autre rapport au logement. Ici, la location n’a rien d’une fatalité : elle s’appuie sur de solides bailleurs institutionnels et sur des modèles coopératifs, hérités de la reconstruction et de politiques sociales volontaristes. La propriété n’a tout simplement pas la même portée symbolique.
  • Quant à la France, elle jongle avec un marché tendu dans les grandes villes, des prix élevés et une offre de logements sociaux conséquente. Louer reste donc un choix pragmatique pour de nombreux ménages, malgré une aspiration persistante à « devenir propriétaire ».

Ces modèles pluriels dessinent des profils contrastés chez les locataires. En Allemagne, près d’un foyer sur deux occupe un logement en location. En Pologne ou en Grèce, la propriété s’impose presque systématiquement, portée par un héritage patrimonial et une offre locative plus restreinte. Le prix du mètre carré, la mémoire collective, la politique du logement… chaque pays trace ainsi ses propres lignes de partage.

Les pays européens où l’on loue le plus : chiffres et classement

Le classement international des pays où la part des locataires est la plus forte vient bousculer les idées reçues sur la propriété immobilière. En tête, la Suisse : avec seulement 41,6 % de propriétaires, la majorité de la population y vit en location. Ce modèle tient autant à la tradition helvétique qu’à un marché locatif privé et coopératif remarquablement structuré.

Juste derrière, l’Allemagne affiche 51,1 % de propriétaires. Autrement dit, un habitant sur deux est locataire. À Berlin, Munich ou Hambourg, la location s’impose comme une norme, portée par de puissants bailleurs et un parc coopératif de grande ampleur. L’Autriche ferme la marche du trio de tête avec 55,2 % de propriétaires, soit là encore une forte présence de locataires.

Pour donner une vision concrète de la situation, voici les chiffres clés pour les principaux pays concernés :

  • Suisse : 58,4 % de locataires
  • Allemagne : 48,9 % de locataires
  • Autriche : 44,8 % de locataires
  • Suède : 36,4 % de locataires
  • France : environ 33 % de locataires

Dans ces États, le secteur locatif joue un rôle de premier plan, très loin du modèle dominant en Europe de l’Est ou du Sud. Les différences se creusent sous l’effet des politiques publiques, de la composition du parc immobilier et du dynamisme urbain. Dans les grandes villes allemandes et suisses, louer son appartement ne surprend personne : l’encadrement légal et la diversité de l’offre rendent ce choix naturel, voire confortable.

Groupe divers de locataires relaxant dans le salon convivial

Entre traditions, économie et politiques publiques : ce qui explique les différences

Derrière ce grand écart du taux de propriétaires en Europe, les racines sont multiples et profondément ancrées. À l’Est, la privatisation des logements après la fin de l’URSS a totalement rebattu les cartes. Prenons la Roumanie : la quasi-totalité des logements communistes a été transférée gratuitement à leurs occupants, propulsant le taux de propriétaires à 95,8 %. Même dynamique en Pologne ou en Hongrie, où la propriété s’est imposée comme norme, héritée du contexte historique.

En Europe du Sud, l’attachement à la propriété immobilière est solidement enraciné. Acquérir sa résidence principale en Espagne ou en Italie relève presque du passage obligé, une étape attendue dans le parcours de vie. Ici, la propriété incarne la réussite, la protection du foyer, la transmission du patrimoine. Le marché locatif, souvent moins développé, renforce ce réflexe.

Ailleurs, notamment en Europe du Nord et dans une partie de l’Ouest, un autre modèle s’est imposé au fil des décennies. En Allemagne, près de la moitié des habitants vivent en location. Cette réalité s’explique par le poids de l’histoire : la reconstruction de l’après-guerre a offert une place de choix aux pouvoirs publics et aux coopératives dans la gestion des logements à louer. Dans des villes comme Stockholm, Zurich ou Paris, la flambée des prix immobiliers rend l’achat difficile, surtout pour les primo-accédants. En France, l’abondance de logements sociaux et la concentration du marché immobilier dans quelques métropoles rendent la location pertinente, en particulier pour les jeunes actifs et les ménages mobiles.

Au bout du compte, la manière d’habiter l’Europe se joue autant dans le portefeuille que dans la mémoire collective. À chaque pays, ses raisons, ses héritages, ses arbitrages. Et si la propriété fait rêver certains, ailleurs, la location s’impose, tout simplement, comme une évidence du quotidien.